Fin de vie et soins palliatifs : dispositifs légaux et droits des personnes
L’accès aux soins palliatifs à l’hôpital, en institution ou à domicile, a vu le jour dans la loi du 9 juin 1999.
La loi du 22 avril 2005 introduit dans le droit français la notion d’« obstination déraisonnable » et oblige à dispenser des soins palliatifs au malade souffrant d’une pathologie incurable.
La loi du 2 février 2016 garantit une fin de vie digne et apaisée pour tous et institue la sédation profonde et continue.
Le plan national 2015-2018 encourage la démarche palliative partout où elle est nécessaire par l’information de la personne sur ses droits et la formation des professionnels, le développement de la prise en charge de proximité et la garantie d’une égalité d’accès aux soins palliatifs.
Les professionnels de santé doivent mettre en œuvre « tous les moyens à leur disposition pour que ce droit soit respecté ».
1. Qu’est-ce que la fin de vie et quels sont les droits de la personne en fin de vie ?
Dans son rapport 2014, l’Observatoire national de la fin de vie la caractérise par deux critères « permettant d’identifier avec une grande fiabilité les personnes susceptibles de décéder à court ou moyen terme » : l’existence d’une maladie grave, en phase avancée ou terminale et la réponse « non » à la question « seriez-vous surpris si ce patient décédait au cours des six prochains mois ? ».
Le code de la santé publique (CSP) utilise l’expression « phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause » (art. L.1110-5-3, L.1111-12).
Comme tout malade, la personne en fin de vie bénéficie des droits humains fondamentaux (CSP, art. L.1110-1), du droit à l’information et à l’accès à son dossier médical (CSP, art. L.1111-2, L.1111-3, L.1111-7). Elle doit bénéficier des traitements, des soins et thérapies efficaces, sécurisés et les plus appropriés, du meilleur apaisement possible de la souffrance, et ne pas courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté (CSP, art. L.1110-5, L.1110-5-3).
Tout traitement est conditionné à un consentement « libre et éclairé », sauf urgence (CSP, art. L.1111-4). Toute personne malade dont l’état le requiert accède à un accompagnement de fin de vie et à des soins palliatifs (CSP, art. L.1110-9).
2. Que sont l’accompagnement de la fin de vie et les soins palliatifs ?
L’accompagnement de la fin de vie consiste en la prise en charge globale d’une personne atteinte d’une maladie grave et évolutive mettant en jeu à court ou moyen terme le pronostic vital, pour lui assurer la meilleure qualité de vie possible. Il s’effectue à l’hôpital, au domicile ou en institution.
Cet accompagnement donne lieu à la mise en place de soins actifs et continus, dits palliatifs. Pratiqués par une équipe interdisciplinaire, ils ont pour but de soulager les douleurs physiques, d’apaiser la souffrance psychique, sociale et spirituelle, de sauvegarder la dignité de la personne malade et de conforter son environnement psychologique et social ainsi que celui de son entourage (CSP, art. L.1110-10, L.1110-11).
Les personnels soignants bénéficient de formations et de soutien. Les soins palliatifs s’intègrent dans la continuité des soins prodigués à la personne malade. Ils complètent les soins curatifs ou non, lorsque le traitement curatif est arrêté. Ils visent à améliorer la qualité de vie des patients et de leur famille et à éviter l’obstination déraisonnable d’une poursuite de traitement tout en refusant de provoquer intentionnellement la mort.
3. Qu’est-ce que l’obstination déraisonnable et comment l’arrêt d’un traitement est-il mis en œuvre ?
L’obstination déraisonnable est le fait d’entreprendre ou de poursuivre, de façon inutile, disproportionnée ou sans autre objectif que de maintenir artificiellement la vie, des actes de prévention, d’investigation, de soins ou des traitements – la nutrition et l’hydratation artificielles notamment. Au cas où ils sont suspendus ou non entrepris, le médecin doit assurer au patient une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance (CSP, art. L.1110-5, R.4127-37).
Un patient capable d’exprimer sa volonté peut prendre la décision de « refuser ou de ne pas recevoir un traitement » sans que le médecin puisse contrevenir à cette volonté. Le malade est informé des conséquences de son choix et de sa gravité, et il doit réitérer ce choix dans un délai raisonnable. Cette décision et l’ensemble de la procédure figurent au dossier médical.
Si le patient est inconscient, le médecin consulte et respecte les directives anticipées de la personne ; à leur défaut, la décision de limiter ou d’arrêter les traitements au titre du refus d’une obstination déraisonnable est prise à l’issue de la procédure collégiale comprenant une concertation avec les membres présents de l’équipe de soins, si elle existe, et la prise d’avis, qui doit être motivé, d’au moins un médecin sans lien hiérarchique avec le médecin en charge du patient, appelé en qualité de consultant. Un deuxième consultant peut être appelé à se prononcer de façon motivée.
Le témoignage de la volonté exprimée par le patient est recueilli auprès de la personne de confiance ou, à défaut, auprès de la famille ou de l’un des proches.
La procédure collégiale peut être engagée à l’initiative du médecin en charge du patient, ou à la demande de la personne de confiance, ou, à défaut, de la famille ou de l’un des proches.
Toute décision relative à l’arrêt ou la limitation d’un traitement est motivée, et la personne de confiance, ou, à défaut, la famille, ou l’un des proches du patient est informée de la nature et des motifs de cette décision. Tous ces éléments figurent au dossier médical (CSP, art. L.1111-4, R.4127-37-1, R.4127-37-2).
4. Qu’est-ce que la sédation profonde et continue et à quelle procédure est-elle soumise ?
La sédation profonde et continue est l’administration de substances provoquant une altération de la conscience qui est maintenue jusqu’au décès ; elle vise à éviter à la personne en fin de vie toute souffrance et toute obstination déraisonnable.
La sédation profonde est associée à une analgésie et à l’arrêt de l’ensemble des traitements de maintien en vie. Elle est conditionnée à l’existence d’une affection grave et incurable, d’un pronostic vital engagé à court terme et d’une souffrance réfractaire aux traitements ou insupportable.
Elle est pratiquée à la demande du patient à l’issue de la même procédure collégiale que celle applicable à l’arrêt du traitement ; l’équipe de soins et le ou les médecins indépendants vérifient que les conditions prévues par la loi sont remplies.
La décision, quel qu’en soit le contenu, est motivée et ces motifs sont inscrits dans le dossier du patient, qui en est informé.
Sauf volonté contraire exprimée par le patient dans ses directives anticipées, la sédation profonde et continue jusqu’au décès, associée à une analgésie, est mise en œuvre lorsque le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté et qu’un arrêt de traitement de maintien en vie a été décidé au titre du refus de l’obstination déraisonnable. La même procédure collégiale (concertation et avis indépendant et motivé) est respectée.
En l’absence de directives anticipées, le médecin en charge du patient recueille auprès de la personne de confiance ou, à défaut, auprès de la famille ou de l’un des proches, le témoignage de la volonté exprimée par le patient (CSP, art. R. 4127-37-3).
À la demande du patient, la sédation profonde et continue peut être mise en œuvre au domicile, dans un établissement de santé ou un Ehpad. La procédure suivie est inscrite au dossier médical du patient (CSP, art. L.1110-5-2).
5. Comment la volonté d’un patient hors d’état de s’exprimer est-elle respectée ?
Les directives anticipées et la désignation de la personne de confiance permettent au patient d’exprimer directement sa volonté quand les circonstances l’en empêchent (CSP, art. L.1111-6, L.1111-11).
Les directives anticipées sont un document daté et signé (CSP, art. R.1111-17), rédigé par une personne majeure pour le cas où elle serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté. Deux témoins, dont la personne de confiance, peuvent attester que le document que le patient n’a pu rédiger lui-même est l’expression de sa volonté libre et éclairée.
Les directives indiquent ses souhaits relatifs aux conditions de limitation ou d’arrêt de traitement. Valables trois ans, elles sont révocables ou modifiables à tout moment et renouvelables (CSP, art. R1111-18). Le médecin doit en tenir compte si elles sont rédigées depuis moins de trois ans avant l’état d’inconscience de la personne.
Le document peut être confié au médecin traitant, à la personne de confiance, à un membre de la famille ou un proche, conservé au dossier médical ouvert à l’occasion de l’admission dans un établissement de santé ou dans un établissement médicosocial (CSP, art. R1111-19).
Un médecin ne peut refuser d’appliquer des directives anticipées manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale qu’à l’issue d’une procédure collégiale au cours de laquelle le médecin recueille l’avis des membres présents de l’équipe de soins, si elle existe, et celui d’au moins un médecin, appelé en qualité de consultant, avec lequel il n’existe aucun lien de nature hiérarchique. Il peut recueillir auprès de la personne de confiance ou, à défaut, de la famille ou de l’un des proches le témoignage de la volonté exprimée par le patient. La décision de refus d’application des directives anticipées est motivée (CSP, art. R.4127-37-1).
Toute personne majeure peut désigner un parent, un proche ou son médecin traitant comme personne de confiance qui sera consultée le jour où elle est hors d’état d’exprimer sa volonté.
6. Qui prend en charge une personne en fin de vie ?
Une personne en fin de vie est prise en charge par des médecins spécialistes (cancérologues, réanimateurs, cardiologues, gériatres, neurologues, psychologues, etc.) et généralistes, des membres des professions paramédicales (infirmiers, aides-soignants, kinésithérapeutes, etc.), des travailleurs sociaux et des auxiliaires de vie. Les établissements de santé publics ou privés et les établissements médicosociaux assurent les soins palliatifs de leurs patients (CSP, art. L.1112-4) et sont chargés à cet égard d’une mission de service public (CSP, art. L.6111-1).
Les lieux, les pôles ou les structures internes où sont dispensés des soins palliatifs sont identifiés dans le projet médical des établissements publics de santé (CSP, art. L.6143-2-2) et dans le projet des établissements ou des services sociaux ou médico-sociaux (CASF, art. L.311-8).
Des bénévoles formés, envoyés par des associations ayant conclu une convention avec ces établissements, peuvent intervenir auprès de la personne malade en fin de vie et de son entourage, avec leur accord (CSP, art. L.1110-11).
7. Quelles sont les instances relatives à l’accompagnement de fin de vie ?
La direction générale de la santé « participe à la mise en œuvre des politiques de lutte contre la douleur et d’accompagnement de la fin de vie » (CSP, art. D.1421-1). Les agences régionales de santé identifient dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens des établissements de santé les services où sont dispensés des soins palliatifs et définissent, pour chacun d’eux, le nombre de référents à former ainsi que le nombre de lits à ouvrir (CSP, art. L.6114-2).
Un rapport du gouvernement au Parlement sur les conditions d’application de la loi du 2 février 2016 et la politique de développement des soins palliatifs dans les établissements de santé, les établissements médicosociaux et à domicile est présenté chaque année lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Conformément au plan national 2015-2018 pour le développement des soins palliatifs et l’accompagnement en fin de vie, le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, créé le 5 janvier 2016 pour cinq ans, réunit les équipes de l’Observatoire national de la fin de vie (ONFV) et du Centre national de ressources soin palliatif (CNRSP). Il est chargé, auprès de la population générale, des institutions intervenant dans le domaine des soins palliatifs et des professionnels de santé, de contribuer à une meilleure connaissance des conditions de la fin de vie et des soins palliatifs, des pratiques d’accompagnement et de leurs évolutions, ainsi que de l’organisation territoriale de la prise en charge des patients et de leur entourage ; de participer au suivi des politiques publiques relatives aux soins palliatifs et à la fin de vie et d’informer, notamment sur la promotion des directives anticipées et de la personne de confiance.
8. Comment l’offre de soins palliatifs est-elle organisée en institution ?
L’accueil des patients en institution s’organise autour des unités de soins palliatifs (USP), des lits identifiés soins palliatifs (LISP), et des équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP).
L’USP est un service spécialisé d’hospitalisation temporaire, exclusivement consacré aux patients en fin de vie dont les situations sont complexes. Elle est composée de professionnels spécialement formés et ne comprend que des lits dédiés à la pratique des soins palliatifs et de l’accompagnement.
Les LISP sont situés dans des services d’hospitalisation, qui, sans disposer de moyens spécialisés, accueillent de nombreux patients en fin de vie et incluent cette pratique dans leur projet de service. Ils assurent la continuité de la prise en charge des personnes habituellement suivies dans l’établissement ou le service. Ils permettent un accueil direct et de proximité des patients suivis à domicile, lors d’une crise ou pour répondre à une demande de répit du malade ou de son entourage.
Rattachées à un établissement de santé, les EMSP, multidisciplinaires et pluri-professionnelles, se déplacent au lit du malade et auprès des soignants, ainsi que dans les Ehpad sous convention avec elles. Elles apportent une aide, un soutien, une écoute active et prodiguent des conseils. Leur mission concerne notamment l’accompagnement psychologique et psychosocial, le rapprochement, le retour et le maintien à domicile, la sensibilisation aux soins palliatifs et à la réflexion éthique (circulaire du 25 mars 2008 relative à l’organisation des soins palliatifs). En 2013, la Drees recensait 130 USP, 4 663 LISP et 431 ESMP.
9. Quels moyens permettent d’accompagner à domicile un malade en fin de vie ?
Le maintien à domicile d’un patient en soins palliatifs s’opère soit par l’hospitalisation à domicile prise en charge et coordonnée par une structure hospitalière (309 en 2014, ATIH) ; soit par le recours à un service de soins infirmiers à domicile (SSIAD), soit à l’aide de professionnels libéraux regroupés ou non dans un des 77 réseaux de soins palliatifs (rapport FIR, 2013).
L’entourage contribue au maintien à domicile. Tout salarié, y compris la personne de confiance, dont un proche fait l’objet de soins palliatifs peut bénéficier d’un congé de solidarité familiale, non rémunéré, de trois mois renouvelable une fois, ou d’une période d’activité à temps partiel. À l’issue de ce congé, le salarié retrouve son emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente (code du travail, art. L.3142-16, L.3142-19 et suivants).
Le bénéficiaire d’un congé de solidarité familiale ou un salarié qui a suspendu ou réduit son activité professionnelle pour accompagner un proche en fin de vie perçoit pendant 21 jours (code de la sécurité sociale (CSS), art. L.168-4) une allocation journalière d’accompagnement (CSS, art. L.168-1). Elle est versée par le régime d’assurance maladie dont relève l’accompagnant, après accord du régime d’assurance maladie dont relève l’accompagné (CSS, art. L.168-6).
Son montant est fixé à 55,21 euros par jour en cas de suspension de l’activité professionnelle (CSS, art. D.168-6). En cas de réduction d’activité, le nombre maximal d’allocations journalières est porté à 42 et le montant de l’allocation diminué de moitié (CSS, art. D.168-8). L’allocation peut être partagée entre plusieurs bénéficiaires pour une même personne accompagnée (CSS, art. D.168-10).
10. Les pratiques hospitalières sont-elles évaluées ?
L’examen de l’approche des conditions de fin de la vie par les établissements de santé constitue un des éléments de la certification de la Haute Autorité de santé. Le critère « prise en charge et respect des droits des patients en fin de vie » vise à l’appropriation par les professionnels de santé, au-delà des services spécialisés, des repères fondant la démarche palliative.
Les établissements de santé sont invités à développer « les compétences professionnelles dans le domaine des soins de confort, la prise en charge de la douleur, l’accompagnement et la réflexion éthique », à garantir le recueil ou la conservation des souhaits des patients sur la limitation ou l’arrêt des traitements et à faciliter « l’anticipation des éventuelles complications liées à une évolution défavorable d’une maladie ».
Source : Gazette Santé Sociale, Levray.
Notre formation
PRÉSENTATION
La mort, la fin de la vie sont des tabous sociaux. Les représentations que nous en avons sont souvent liées à des affects négatifs.
Le professionnel de santé peut se sentir désemparé, pris dans une dynamique très chargée émotionnellement : Que dire ? Que faire ?
Cette formation propose de mieux connaître les enjeux psychiques engagés pour mieux les comprendre afin de pouvoir faire face avec plus de sérénité et d’assurance.
Comment accompagner le patient et son entourage dans ce moment de vie si particulier sera au cœur du propos.
OBJECTIFS
• Permettre au personnel soignant en relation avec des personnes proches de la mort de mieux appréhender la fin de vie.
• Mieux comprendre les problèmes posés par la souffrance physique et psychique.
• Développer des attitudes professionnelles plus humaines.
• Acquérir des moyens relationnels pour savoir quoi dire et comment le dire dans les situations délicates
FORMATEUR
SYLVIE COUDERC-LEVRIER
PSYCHOLOGUE CLINICIENNE – PSYCHO-GÉRONTOLOGUE
PSYCHOLOGUE CLINICIENNE/FORMATRICE
• Depuis 2003 : Formatrice auprès professionnels secteur santé/social
• Depuis 2007 : Animation Groupe d’Analyse de Pratique Professionnelle (soignants institutionnels, soignants à domicile, travailleurs sociaux)
• 2009-2011 : Formatrice IFAS St Antoine
• Depuis 2006 : Psychologue libéral
• 2003-2009 : Psychologue en E.H.P.A.D.