Thérapie manuelle du pied.
Intérêt et modalités en podologie.
À l’occasion de notre prochaine formation BILAN ET DIAGNOSTIC EN PODOLOGIE, le 22 Septembre prochain avec Laurent Souque et Olivier Dantras, nous avons décidé de vous parler aujourd’hui de la Thérapie manuelle du pied, son intérêt et les modalités.
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L’approche en thérapie manuelle des troubles orthopédiques du pied nécessite dans un premier temps l’élaboration d’un diagnostic précis à la recherche de causes tissulaires et après avoir identifié une éventuelle contre-indication (le red flag). Le praticien explore le tissu musculoaponévrotique (recherche de tensions et d’hypoextensibilités) et, en particulier, les mobilités articulaires (les restrictions), sans oublier les liens possibles avec le genou, la hanche et le rachis. Les techniques utilisées pour tenter de traiter les dysfonctions dépendent des causes identifiées : inhibition musculaire, notamment en « phase aiguë », levées de tension et mobilisation des fascias. Les techniques articulaires spécifiques complètent l’approche, à la recherche de la restauration des mobilités spécifiques (glissements, décompression). Cette approche de « libération tissulaire » peut être complétée par des techniques de renforcement et de stabilisation musculaire, ainsi que par des conseils « d’hygiène podale ».
Introduction
Les thérapies manuelles du pied peuvent s’avérer utiles dans le traitement des affections de la cheville, du pied et du membre inférieur. Bien que ces techniques ne fassent pas partie du décret de compétence du pédicure podologue, en avoir une approche tant dans le domaine du bilan diagnostique que du traitement favorise une meilleure efficience. Certaines techniques utilisées vont permettre au praticien d’affiner soit son bilan, soit son traitement. Cette approche va permettre au podologue d’avoir une meilleure connaissance de l’interdisciplinarité due à la complémentarité de chacun des thérapeutes, afin de respecter une gestion des coûts de prise en charge de chaque patient. La compréhension des mécanismes de perte de mobilité permet de comprendre les dysfonctions existantes au niveau des articulations sus-jacentes. Équilibrer les fixations de la cheville et du pied est un préalable pour une meilleure prise en charge podologique avec les différentes approches des corrections ou stimulations orthétiques. Cette dimension corrective joue aussi sur la posture de l’individu.
Dans un premier temps, les rappels généraux et de biomécaniques permettront de mieux comprendre les pathologies rencontrées ainsi que les contre-indications de la thérapie manuelle.
Dans un second temps, le bilan diagnostique en thérapie manuelle permettra d’établir le traitement autour des techniques de levées de tension, d’inhibition, de fasciathérapie ou de mobilisations spécifiques.
Thérapie manuelle
Définitions
La thérapie manuelle se définit comme « l’art de soigner avec ses mains ». Cette définition assez vague regroupe différentes techniques complémentaires que nous développerons dans les chapitres suivants, mais traduit deux idées clés.
La première, « soigner », ce qui dépasse le simple soulagement d’un symptôme et réclame donc un diagnostic précis, la seconde « avec les mains », celles-ci sont douées d’une sensibilité très fine à la suite d’un entraînement suffisant et un processus de formation adapté. L’usage de la main pour soigner est décrit depuis l’Antiquité, sa grande sensibilité sensorielle et son importante représentation sur l’homonculus sensoriel et moteur en font un outil d’une grande précision dans un but diagnostique comme dans un but thérapeutique.
Nous aborderons quatre techniques différentes basées sur des principes d’action en lien avec un diagnostic tissulaire différentiel : les levées de tension, les techniques d’inhibition musculaire, la mobilisation des fascias ainsi que les mobilisations spécifiques.
Le terme général « dysfonction » est utilisé en thérapie manuelle et traduit toute perte de mobilité, qu’elle soit articulaire, musculaire, neurale, fasciale, voire viscérale.
Modalités
Ces techniques ont des principes d’action totalement différents mais ont un but commun : restituer la mobilité à la fois des tissus mous et articulaires. Elles sont variées et répondent aux résultats du bilan différentiel.
• Les techniques de levées de tension utilisent le « contracté–relâché » sur une mise en course externe non douloureuse d’un muscle, à la suite d’un diagnostic « d’excès de tension » du corps charnu.
• Les techniques d’inhibition musculaire recherchent le relâchement par positionnement, le plus souvent en position courte non maximale, à la suite de la détection de points « sensibles » (tender points) répertoriés sur une cartographie. Les règles biomécaniques musculaires reposent plutôt sur une connaissance de la physiologie musculaire issue des travaux anciens de Korr, Sherrington et Kabat, validés pour certains par Fryer et al.
• Les techniques « fasciales » cherchent à restaurer les plans de glissement d’un tissu conjonctif fibrosé par des techniques de « crochetage » et de « ponçage–mobilisation ».
• Les mobilisations spécifiques qui permettent de redonner aux différentes articulations concernées une mobilité physiologique perdue, dans un ou plusieurs plans, pour des raisons dysfonctionnelles soit d’origine traumatique ou dégénératives.
Les mobilisations spécifiques le sont à deux égards : elles sont spécifiques d’une articulation donnée, ce qui n’est pas toujours aisé à la cheville et au pied à cause du nombre d’articulations et de l’étroitesse de certains os nécessitant des prises précises et des mouvements ciblés. L’autre spécificité est de rechercher les mobilités dites combinées, c’est-à-dire qu’avec le mouvement majeur d’une articulation se produisent les mouvements mineurs associés (Fig.1,2), ainsi que les tractions indispensables à la physiologie de l’articulation (Fig.3).
Ces techniques s’appuient sur le respect des règles biomécaniques issues des travaux de Kaltenborn, Mennel, Maitland, Mulligan et sont la base à connaître du point de vue articulaire. Par exemple, toute restriction de mobilité de la fibula aura des répercussions sur la mobilité de la cheville lors des mouvements de la flexion dorsale de la talocrurale.
L’ensemble des études scientifiques va dans le sens d’une prise en charge globale de la dysfonction articulaire tant sur le plan musculo-aponévrotique que sur le plan articulaire.
À la lumière des travaux récents de Lorimer Moseley, la prise en charge de la douleur et notamment de la douleur chronique, surtout de ses causes tissulaires, nécessite une approche globale.
Ces théories se retrouvent dans les neurosciences et les sciences de l’éducation dans le constat de la complémentarité de deux modèles de santé, le biomédical curatif où le praticien soigne avant tout une dysfonction organique ou tissulaire ou une pathologie, le patient étant passif et le système global non positiviste qui conçoit l’individu comme un tout avec son environnement et qui tout en intégrant le modèle biomédical curatif, prend en compte des dimensions environnementales et éducatives pour rendre le patient auteur de sa prise en charge.
Biomécanique du pied
Généralités
Le pied participe à la fonction d’équilibration du corps (capteur podal) tout autant qu’il en a la fonction de support corporel en gérant les contacts statiques et une fonction de propulsion et de réception dans les contacts dynamiques avec le sol.
Les afférentes extéroceptives de la peau plantaire couplées aux afférentes proprioceptives des muscles du pied et de la cheville, sont essentielles à la régulation de la posture debout.
Ces afférentes provenant du pied sont intégrées par les centres nerveux du systéme postural, en parallèle avec les informations sensorielles provenant du vestibule, de l’œil, des muscles du rachis et de la peau qui recouvre ces muscles, pour l’orientation et la stabilisation du corps en situation statique et dynamique.
Lors de la mobilisation des segments corporels, les ajustements posturaux nécessaires à la stabilisation du corps sont toujours contrôlés en partie par les muscles des jambes et des pieds seul des forces appliquées aux pieds peut déplacer le centre de gravité et initier un déplacement corporel.
D’où l’importance de préserver mobilité, force musculaire et sensibilité du pied pour un meilleur contrôle de l’équilibre, surtout pour les personnes âgées dont le risque de chute est plus élevé.
La forme du pied et de la plantaire a été comparée à celle d’une voûte soutenue par trois arches, à une ferme, et à une hémicoupole à convexité externe.
Les dysfonctions statiques ou dynamiques du pied sont susceptibles en plus des troubles sensoriels et mécaniques locaux d’avoir un retentissement sur les genoux, la hanche, la colonne lombaire et le crâne.
Préserver ou essayer de restaurer la fonctionnalité de ces deux systèmes que sont la peau et les structures musculosquelettiques des arches de la voute sont les objectifs de la thérapie manuelle du pied secondée par la réalisation d’orthèses par une action locale ou à distance.
Biomécanique
Après une approche générale, chaque groupe d’articulation sera envisagé du point de vue biomécanique. Cette analyse permet de guider le bilan ainsi que le traitement en thérapie manuelle.
La cheville est un complexe articulaire formé par la pince tibiofibulaire inférieure, elle-même étroitement liée à l’articulation tibiofibulaire supérieure et à l’arrière-pied, constitué du talus et du calcanéus. Sa fonction principale est de lier le segment jambier et le pied et de permettre le mouvement de flexion plantaire et de flexion dorsale nécessaire lors la marche, en chaîne ouverte avec l’inversion de point de fixe.
Le pied se décompose trois zones : arrière-pied, médiopied et avant-pied. Chaque zone est indispensable pour le bon déroulé du pied et des zones d’appui. L’arrière-pied est constitué de la subtalaire et du capiton calcanéen, le médiopied est délimité par la transverse du tarse (Chopart) en arrière et par la tarsométatarsienne en avant (Lisfranc) ainsi que les articulations entre le naviculaire, les cunéiformes en médial et le cuboïde en latéral (Fig.4).
Chacune de ces articulations est indispensable au bon déroulement du pas et des zones d’appui. Toute perte de mobilité d’une de ces articulations peut générer une douleur par mise en tension d’éléments capsuloligamentaires et tendineux ou à l’inverse inhiber la contraction musculaire perturbant la marche et la répartition des appuis. Un examen minutieux, passif, symétrique et comparatif de la mobilité de chaque articulation est alors le meilleur moyen de diagnostiquer un défaut de mobilité. Les examens moteurs simples par mise en évidence des différentes actions musculaires sont une première étape didactique qui doit nécessairement être complétée par un examen plus fonctionnel, un examen des appuis plantaires sur podoscope et un examen de la marche. Nous voulons attirer l’attention du lecteur sur la difficulté d’analyse d’une perte de force musculaire car plusieurs causes, certaines inhérentes au muscle, d’autres inhérentes à la douleur et l’inhibition par les voies suprasegmentaires sont envisageables. Si le renforcement musculaire trouve une justification dans les premiers cas, il peut au contraire être délétère car il risque de majorer la douleur dans la seconde hypothèse. L’examen clinique permet de lever cette ambiguïté dès la première consultation.
Le talus présente plusieurs particularités. Cet os est mal vascularisé notamment dans sa partie médiane. En cas de traumatisme, surveiller les signes d’apparition d’une nécrose semble indispensable.
Le talus n’a pas d’insertion musculaire, ce qui lui confère une mobilité particulière dans la pince tibiofibulaire. Sa stabilité antéropostérieure est contrôlée par un facteur osseux, le dôme talien qui est plus large en avant qu’en arrière et un facteur musculaire, le long fléchisseur de l’hallux (LFH) qui le coapte dans la pince. Cela confère une bonne stabilité de la pince tibiofibulaire en flexion dorsale de la cheville. L’ouverture de la pince est réalisée passivement grâce à l’engagement de la partie large du talus. La fermeture est active par contraction des muscles rétromalléolaires qui vont assurer la stabilité de la pince. L’action conjointe des muscles tibial postérieur (TP), long fléchisseur des orteils (LFO), LFH, pour le plan médial, et des court et long fibulaires, pour le plan latéral, permet de fermer activement la pince. La stabilité de la cheville trouve donc ici une de ses limites car, en cas de déstabilisation plus rapide ou plus forte que la réaction de protection de ces muscles, l’instabilité générera une entorse de la cheville, touchant avec une très grande prévalence le faisceau antérieur de ligament collatéral fibulaire. Cela d’autant plus facilement que l’innervation de la zone capsuloligamentaire n’est pas la même que celle des différents muscles en présence.
Cette double trochoïde inversée est souvent oubliée dans la physiologie du pied. Il est classiquement entendu qu’elle tangue, vire et roule (frontal, horizontal et sagittal) pour le calcanéus en chaîne ouverte et pour le talus en chaîne fermée. Cette articulation possède peu de moyens d’absorption des contraintes importantes auxquelles est soumise, plus mobile en décharge et autostable en charge. Les glissements sagittaux et latéraux participent à l’absorption de ces contraintes. Sa conformation inversée avec un ligament interosseux puissant correspond à un besoin de stabilité.
Après un traumatisme, il se peut que le calcanéum perde une partie de sa mobilité indispensable à la gestion de ces contraintes.
Intercalé entre l’arrière-pied aux mouvements de varus et de valgus et la palette métatarsienne aux appuis variables lors du cycle de marche, le médiopied doit avoir une bonne mobilité pour permettre aux deux extrémités d’avoir des mobilités dissociées.
Lors des traumatismes du pied ou selon le chaussage, il peut subir des contraintes capables de restreindre sa mobilité.
De plus, il est le point de départ de tendons qui assurent la stabilité de la cheville (TP, court fléchisseur [CF] et long fléchisseur [LF]), en cas d’atteinte, il peut perturber l’action de ces muscles.
La fonction du médiopied est assujettie à la position de fonction de l’articulation sub-talaire. Si celle-ci est en pronation, l’angle de divergence talocalcanéen augmente et les axes du naviculaire et du cuboïde deviennent parallèles, ce qui facilite la mobilité et l’adaptation du pied au sol.
Si l’articulation sub-talaire est en supination, l’angle de divergence talocalcanéen diminue et les axes du naviculaire et cuboïde convergent, ce qui rigidifie le pied pour assurer la stabilité notamment lors de la phase de propulsion du pas postérieur.
Lors de la marche en chaîne fermée la mobilité du naviculaire et du cuboïde suivra une composante de pronation–supination selon un axe antéropostérieur pour l’adaptation du pied au sol.
Articulation talonaviculaire
La souplesse du ligament glénoïdien donne l’élasticité de l’arche interne. L’articulation talonaviculaire a un rôle très important dans la transmission des forces de l’avant-pied vers l’arrière-pied–il est important de respecter son intégrité et de préserver l’intégrité du TP qui le mobilise sous peine d’augmenter les contraintes sur l’arche interne et de déstabiliser l’articulation subtalaire.
L’articulation tarsométatarsienne (Lisfranc) est une succession de surfaces planes, avec un point de fixité créé par l’encaissement du deuxième métatarsien entre les 1er et 3e cunéiformes. Il sert d’axe à la pronation–supination de l’avant-pied. Les orteils peuvent aussi présenter des déformations liées aux muscles longs et courts ainsi qu’à des défauts articulaires.
La transmission à l’avant-pied des mouvements d’inversion–éversion se fait directement par les cunéiformes et la partie interne de l’articulation de Lisfranc (articulation talonaviculaire pour les trois rayons de l’arche interne et par l’articulation calcanéocuboïdien pour l’arche externe).
La faible mobilité des interlignes tarsométatarsiennes permet une adaptation exacte du pied selon les besoins et une répartition des appuis des têtes métatarsiennes.
Les mouvements principaux sont l’extension et la flexion. La flexion a tendance à augmenter l’arche antérieure.
Il faut souligner l’importance des muscles intrinsèques du pied, notamment les interosseux qui soulagent l’appui des têtes métatarsiennes par un double mécanisme de creusement de la voûte plantaire antérieure et de stabilisation en flexion des phalanges proximales évitant la griffe des orteils et favorisant la mise en appui des pulpes digitales lors de la contraction des longs fléchisseurs.
En raison de la constitution du triceps, il est important de vérifier l’amplitude de la flexion dorsale de la cheville et du genou en extension pour tester la tonicité du gastrocnémien et genou fléchi pour tester la tonicité du soléaire. Un « Achille court » limite la flexion dorsale de la cheville et représente un facteur favorisant dans les enthésopathies du tendon, le valgus calcanéen et la surcharge de l’arche interne.
Les muscles LFH, LF, CF, TP sont des muscles retromalléolaires à action antigravitaires et, avec le triceps, ils gèrent la position sagittale de la projection du centre de gravité du corps en position statique debout en avant de l’axe de la cheville et la stabilité du pied dans le plan frontal et transversal en appui unipodal.
Ils sont au nombre de trois, voire de quatre (troisième péronier), et participent au travail de freination de la pointe du pied vers le sol dans le cadre de la marche. L’extenseur des orteils est le muscle éverseur type en l’absence de troisième fibulaire. Il assure la stabilité latérale de la cheville. Son insuffisance proprioceptive est souvent à l’origine d’entorse latérale.
Pathologies rencontrées pour lesquelles la thérapie manuelle est efficace
Tendinopathies
L’augmentation des contraintes sur le tendon peut trouver une origine locale, régionale ou à distance.
Localement, lorsqu’un muscle se contracte, la mise en tension du tendon se fait progressivement à deux conditions : que l’articulation sur laquelle agit le tendon soit mobile et que le corps charnu ne soit pas hypoextensible. Les techniques musculaires ou de mobilisation spécifique trouvent une place complémentaire aux semelles orthopédiques.
Régionalement, un genu valgum acquis entraîne une composante pronatrice du pied mettant en tension le tibial postérieur et le LFH. Une correction podale peut trouver une efficacité accrue si le genu valgum est lui aussi traité par équilibre des tensions musculaires, étirement du plan latéral (TFL en particulier) et renforcement du plan médial (muscles de la patte d’oie).
À distance, un trouble de la posture peut favoriser une ligne de gravité plus ou moins antérieure par rapport à l’axe de mobilité talocrurale mettant en contrainte les structures myo-aponévrotiques postérieures.
Aponévrosite plantaire
L’aponévrosite ou « fasciite plantaire » est une inflammation douloureuse de ce fascia.
L’aponévrosite se caractérise généralement par de la douleur au talon, souvent du côté interne. Parfois cette douleur se présente sur toute la longueur du fascia ou près de ses origines sur les orteils. Elle peut aussi toucher les insertions des muscles intrinsèques du pied (court fléchisseur des orteils, abducteur de l’hallux, abducteur du V).
La douleur se manifeste souvent au sortir du lit ou après une longue période lors des premiers appuis. Elle diminue graduellement lors de la marche (sans nécessairement disparaître). La douleur peut être ressentie autant sur terrain mou que sur terrain dur. La palpation du talon au point d’insertion de l’aponévrose plantaire peut provoquer des douleurs, particulièrement si celle-ci est mise en tension, par exemple par une flexion dorsale des orteils.
L’approche de la thérapie manuelle sera celle des tissus conjonctifs ou fascia. Les techniques encore une fois ont pour but de redonner de la mobilité là où elle a disparu ou surtout diminué. Les techniques fasciales trouvent là une application possible associées aux techniques de crochetage.
Entorse
Comme nous l’avons expliqué précédemment, la cheville présente plusieurs explications anatomiques et biomécaniques pour justifier la prévalence des entorses de la cheville en inversion, avec atteinte du faisceau antérieur du ligament collatéral fibulaire de la cheville.
Le premier traitement relève de l’immobilisation afin de favoriser la cicatrisation du ligament atteint. Les contentions adhésives de type strapping ou taping présentent un intérêt majeur, plus efficaces qu’une atèle semi-rigide. L’immobilisation totale n’est indiquée qu’en cas d’entorse grave avec arrachement osseux ; rappelons que la cicatrisation tissulaire est guidée par la contrainte mécanique, l’immobilisation totale produit une cicatrisation désorganisée et anarchique du tissu conjonctif.
Dans un second temps, le traitement de la « cicatrice » ligamentaire peut s’avérer indispensable si des adhérences se sont installées. La mobilisation transversale profonde décrite par Cyriax et Troisier permet de retrouver de la mobilité des différents plans de glissement et ainsi, indirectement, de réduire la douleur.
Les articulations du médiopied et de l’arrière-pied peuvent avoir subi lors du traumatisme un « blocage » articulaire.
Lors du traumatisme, l’installation d’un excès de tension musculaire du tibial postérieur et des fibulaires peut avoir aussi favorisé de tels blocages.
La thérapie manuelle permet alors de retrouver la mobilité nécessaire à la sédation de la douleur et la récupération de la flexion dorsale de la cheville souvent limitée après une entorse, facteur qui favorise les récidives d’entorse. Il est à noter que, lors d’une entorse, une perte de mobilité de l’arrière-pied et du médiopied est fréquemment retrouvée. Cette diminution de mobilité peut être à l’origine de compensations du genou, de la hanche et de la mobilité lombopelvienne. La récupération rapide des amplitudes fonctionnelles de toutes les articulations du pied permet d’éviter que ces compensations deviennent symptomatiques. Il est fréquent de retrouver des douleurs des articulations bloquées, beaucoup plus que sur le ligament étiré lors du mouvement traumatique.
Arthrose
En cas de défaut de couverture cartilagineuse, la pression dans l’os sous-chondral augmente et produit la douleur. Ce cas extrême dépasse la thérapie manuelle et réclame le plus souvent un traitement chirurgical par arthrodèse ou prothèse, selon l’articulation considérée, ou médical par injection dans l’articulation d’acide hyaluronique, par exemple.
Une autre explication à la douleur arthrosique peut exister. La présence d’une réaction chimique pseudo-inflammatoire, visible par un léger œdème résultant d’une libération de liquide interstitiel, est possible. Le traitement médicamenteux anti-inflammatoire trouve ici sa place. Cependant, la résorption du liquide et l’immobilisation relative pendant cette phase favorisent un défaut de mobilité tissulaire des tissus concernés, notamment les tissus périarticulaires, ligamentaires, synoviaux et tendineux.
Ces éléments ayant perdu de leur mobilité peuvent être secondairement à l’origine de douleurs, lors des mouvements passifs et actifs réalisés par le patient. La thérapie manuelle peut alors apporter des solutions thérapeutiques par restitution de la mobilité.
Hallux valgus
L’hallux valgus unilatéral est souvent associé à une pathologie de l’arrière-pied, soit un valgus du calcanéus. Lors de la marche, le valgus statique va s’exagérer et accélérer la phase valgisante pendant le passage du pas. L’angle de divergence talocalcanéen augmente, entraînant une surcharge de l’arche interne avec une poussée vers le bas du talus sur le naviculaire et un premier rayon qui s’horizontalise. Le déséquilibre musculaire ainsi créé favorise l’apparition de l’hallux valgus. La thérapie manuelle, en réaxant l’arrière-pied et en intervenant sur l’hallux valgus par technique d’inhibition agira sur la composante mécanique et sur la douleur de ce dernier, en complément de l’orthèse.
Hallux rigidus et limitus
Une marche normale nécessite une flexion dorsale de l’hallux de 80◦. Selon Hicks la flexion dorsale active ou passive de l’hallux creuse et rigidifie l’arche interne. L’hallux rigidus ou limitus va modifier le pas postérieur et entraîner des compensations du pied ou de la hanche. L’hallux rigidus ne peut bénéficier d’une thérapie manuelle efficace, l’hallux limitus peut être amélioré dans une certaine mesure par des techniques spécifiques cherchant à retrouver le glissement de l’hallux sur le premier méta- tarsien.
Métatarsalgies
Les interosseux et le court fléchisseur du I, en fléchissant la phalange proximale sur le premier métatarsien permettent non seulement au LFH et au LFO d’être efficace, mais aussi de protéger des contraintes des têtes métatarsiennes. La thérapie manuelle, en évaluant et en essayant de renforcer ces muscles toujours faibles dans ces affections peut avoir une action efficace.
La présence de douleur permet d’en déduire de possibles étiologies mécaniques. Cette première partie sera complétée par l’examen clinique lui-même, constitué de la palpation, de la mobilisation et de l’inspection. Le but de l’examen est de reproduire la douleur habituelle du sujet par la palpation et la mobilisation afin de déterminer la ou les structures responsables du problème ou de la douleur par application de contraintes mécaniques simples.
Contre-indications
Elles reposent sur le principe maintenant connu des orange ou yellow flags (feux oranges, contre-indications relatives) et red flags (contre-indications absolues). Elles donnent les grandes orientations du diagnostic d’exclusion permettant au praticien d’éviter la prise en charge de pathologies.
Contre-indications relatives
Elles sont :
- pathologie inflammatoire avérée ou suspectée ;
- traumatisme inaugural, récent ou non investigué ;
- répétition permanente des symptômes ;
- troubles psychiatriques ;
- impossibilité de prendre appui ;
- hématome plantaire ;
- douleur
Âge
L’âge dans ses deux extrêmes doit inviter à la prudence et à la modération des techniques de mobilisation spécifique ou de levées de tension. Les structures vasculaires, osseuses et chondrales peuvent faire preuve d’une certaine fragilité sans que l’on ait de moyen très fiable pour les évaluer.
Traumatisme
Les traumatismes doivent toujours inspirer la prudence et contre-indiquer la thérapie manuelle en première intention. Le risque de fracture contre-indique formellement la mobilisation spécifique. La radiographie standard doit alors être privilégiée pour rechercher d’éventuelles atteintes osseuses.
Certains traumatismes peuvent produire des lésions osseuses n’ayant pas de signes à la radiologie standard, mais pouvant générer des douleurs pendant un temps très long, nécessitant une imagerie par résonance magnétique (IRM) pour être mise en évidence.
Pathologies systémiques
Les pathologies inflammatoires et cancéreuses doivent contre- indiquer la thérapie manuelle. L’horaire nocturne de la douleur doit interpeller (la cheville et le pied peuvent être le siège des premiers signes d’une polyarthrite rhumatoïde).
La perte de poids inexpliquée, un état de fatigue chronique ou des antécédents cancéreux doivent alerter sur le risque potentiel de pathologie tumorale (présence de nombreux marqueurs sanguins).
Bilan en thérapie manuelle
Il se décompose en trois dominantes :- un bilan « local » qui est aussi un bilan tissulaire réalisé « tissu par tissu » à la recherche d’informations concernant les dysfonctions. Si la douleur n’est pas oubliée, c’est la recherche d’une perte de glissement qui est pour nous significative. Une reproduction « palpatoire » de la douleur est menée pour mettre en évidence la structure qui souffre
– un bilan « régional » afin d’éviter des « oublis » ou des « erreurs » d’interprétation conduisant éventuellement à un échec thérapeutique. Il permet de comprendre les notions de chaîne « montante » et « descendante » et l’interaction articulaire existante (examen de la hanche et du genou) ;
– un bilan « à distance » s’intéressant tout particulièrement au rachis et notamment lombal (possible douleur projetée d’origine L5 ou S1 par exemple).
Abord musculoaponévrotique
Les tensions dites métaboliques sont le plus souvent « chroniques », voire anciennes, et peuvent entraîner une modification de l’équilibre postural du patient. La clinique révèle deux indicateurs importants : l’hypoextensibilité et l’augmentation de la rénitence musculaire (tension musculaire permanente en dehors de tout maintien postural). Elles sont mises en évidence par une palpation transversale dans le corps musculaire et s’associe à une perte de l’extensibilité musculaire (signe de l’atteinte conjonctive du muscle et de l’ancienneté de la dys- fonction). On retrouve lors du bilan des muscles longs touchés, souvent polyarticulaires.La contracture « myoélectrique » se caractérise par une perception douloureuse de la part du patient, une augmentation de la sensation de tension dès le début de l’étirement, mais sans trouble conjonctif palpable. Les muscles touchés sont plutôt des muscles courts.Cette analyse de l’état de tension nous amène à proposer trois stratégies thérapeutiques différentes.Pour traiter une tension de type « myoélectrique », les techniques de relâchement positionnel en raccourcissement seront utilisées. Elles présentent l’intérêt supposé de diminuer la tension du fuseau neuromusculaire. Pour une tension musculoaponévrotique d’origine métabolique, ce sont les techniques de levées de tensions qui sont privilégiées.
Levées de tension
Cette technique kinésithérapique s’est développée dans les années 1980 sous l’impulsion de Péninou en France.Après un bilan dit tensionnel (recherche de l’augmentation de la rénitence, dysmorphie liée à la position du muscle en course interne, douleur à la contraction et à l’étirement), le praticien réalise la technique selon les étapes suivantes : mise en course externe supportable du muscle, contraction statique contre résistance manuelle du praticien, relâchement, étirement passif.
Inhibition musculaire
Les travaux de Jones issus des travaux de Hoover et corroborés par Chaitow, ont permis de mettre au point une cartographie de points dont la dénomination est variable en fonction des auteurs.La technique consiste en un positionnement qui produit le maximum de relâchement, permettant théoriquement la sédation totale de la douleur. C’est le plus souvent vers la position interne, mais rarement en course interne maximale. Toutefois, certains points sont décrits à l’inverse, c’est-à-dire légèrement en course externe. Une fois la bonne position trouvée, le praticien la maintient pendant 90 secondes. Ce temps est le minimum trouvé par Jones au bout duquel tous les points ont cédé.
Cette technique trouve différentes explications complémentaires pour 60 à 80 % de bons et de très bons résultats selon les études.
La recherche palpatoire prédomine encore dans le diagnostic pour cette technique ainsi que dans sa réalisation. Le patient participe en guidant le praticien pour trouver la situation la plus indolente, mais en aucun cas le patient ne participe activement à la réalisation de la technique dont le retour en situation neutre doit se faire passivement et, surtout, lentement.
Les zones fibrosées présentes notamment sur « l’aponévrose du soléaire » et le « fascia plantaire » peuvent être traitées par « décordage » et « ponçage ».
Abord articulaire
Le pied et la cheville possèdent un fort système ligamentaire et aponévrotique. Parallèlement, les « surfaces » des os pour réaliser les prises sont petites. Ces deux paramètres conjugués expliquent pourquoi les mobilisations spécifiques de la cheville et du pied nécessitent précision et intensité pour pouvoir être efficaces.
Examen clinique
Préalable indispensable avant toute pratique manuelle ciblée sur une articulation, l’examen clinique doit commencer par une appréciation globale de la mobilité du pied, puis il est analytique en fonction de l’analyse globale à la recherche de restrictions. Par exemple, un déficit d’extension globale du pied concerne en premier l’articulation talocrurale, puis l’articulation talonaviculaire, puis la sous-talaire.
Tests globaux
Talocrurale
Le praticien peut utiliser une traction de l’articulation en cravatant le col du talus avec la première commissure ou effectuer une mobilisation en flexion–extension de la cheville avec une prise podale et une contre-prise au tiers inférieur de la jambe. Si ces tests globaux montrent une restriction de mobilité, une analyse spécifique de la talocrurale et de la tibiofibulaire inférieure peut être envisagée.
Sub-talaire
Par une prise du calcanéum, talocrurale en position neutre, une abdoadduction du calcanéum est effectuée.
Médiopied et avant-pied
Pour les évaluer, on peut effectuer une pronation (rotation médiale)–supination (rotation latérale) avec une prise au dos du pied. La cheville est en position neutre, et c’est la première commissure qui vient se poser à la face dorsale du pied. On peut tester ici globalement les articulations transverses du tarse (Chopart) et tarsométatarsienne (Lisfranc).
Tests spécifiques
Tibiofibulaire inférieure
Une contre-prise est effectuée en encerclant l’extrémité distale du tibia. La malléole latérale est prise entre pouce et index de l’autre main pour tester les mouvements de glissements antéropostérieurs.
Talus
Pour tester le glissement postérieur, il faut prendre le pied par le bord latéral en venant poser la pulpe du pouce devant la tête du talus, effectuer une flexion dorsale de la cheville en le poussant avec le pouce pour imprimer le glissement voulu. La diminution du glissement postérieur sera associée à la dysfonction du bloc calcanéopédieux (signes cliniques : limitation de la flexion dorsale genou fléchi, douleur ou gêne strictement au cou de pied).
Calcanéum
Une contre-prise cravate à la fois l’extrémité inférieure du tibia et le col du talus et les fixe en position neutre. Une prise passe à la face plantaire du pied et vient empaumer le calcanéum. L’avant- bras doit être en contact avec la plante du pied pour avoir un « bloc calcanéum–reste du pied » sous le talus. De cette fac¸on, il faut tester les mouvements du calcanéum dans les trois plans et surtout les mouvements combinés suivant l’axe de « Henké » (porter le calcanéum en avant et en dedans et donc en varus (pour tester une dysfonction de talus postéroexterne), puis en arrière et en dehors et donc en valgus (pour tester une dysfonction de talus antéromédial).
Naviculaire et cuboïde, cunéiformes et métatarsiens
La cheville est maintenue en position neutre, une contre-prise fixe le calcanéum. La prise s’effectue par la première commis- sure qui vient cravater le pied latéralement, du côté opposé à l’os testé. De cette fac¸on, la pulpe de l’index peut se poser sur sa face dorsale, tandis que celle du pouce se pose à sa face plantaire. Les mouvements de rotation médiale (pronation : la face dorsale va regarder vers le dedans) et de rotation laté- rale (supination : la face dorsale va regarder vers le dehors) sont testés.
La même prise peut être utilisée pour les cunéiformes et les métatarsiens en effectuant ici des glissements supéro-inférieurs.
On peut noter que la mobilité des orteils est à tester de façon « classique ».
Techniques de mobilisation articulaire
Elles constituent la première partie du traitement correspondant à la phase de libération.
Tibiofibulaire supérieure
Lors de l’entorse latérale de cheville, associée à un mouvement forcé en inversion, par exemple, la tension produite par le ligament lors du traumatisme favorise l’abaissement et l’antériorisation de la malléole latérale. Dès lors, il est possible de retrouver un abaissement et un déficit de glissement antérieur de la tête fibulaire. Il est envisageable de mobiliser cette struc- ture en fixant le tibia et en poussant et/ou en tirant par une prise manuelle dans le plan des surfaces articulaires. Le genou doit être pour cela fléchi afin de détendre le biceps fémoral.
Une technique est utilisée pour récupérer le glissement antérieur quand le genou est intègre. En prenant le tiers inférieur de la jambe, en plaçant une main ou même le tiers inférieur de l’avant- bras entre la cuisse et la tête fibulaire (genou en flexion et en rotation latérale) pour simuler un angle et en augmentant alors la flexion du genou, l’angle induit le glissement voulu de la tête de la fibula.
La tibiofibulaire supérieure est à investiguer lors d’un déficit de mobilité de la talocrurale et dans les séquelles d’entorse latérale.
Tibiofibulaire inférieure
Elle est plane avec des surfaces articulaires grossièrement sagittales. Étant donnée l’anatomie de l’os talus, ses moyens d’union antérieure et postérieure sont mis en tension lors d’une flexion dorsale de la talocrurale et les glissements sont plus difficiles à obtenir. Aussi, le manque de liberté articulaire peut entraîner un déficit de flexion dorsale de la cheville. Dans l’entorse latérale, la malléole latérale peut être portée en bas et en avant et le glisse- ment postérieur peut ainsi devenir déficitaire. Le patient peut être en décubitus dorsal, hanche et genou en flexion. Le pied repose sur la table, cheville en flexion plantaire. Le praticien fixe le tibia par une prise au tiers inférieur de la jambe. Il pose son éminence thénar en regard du bord antérieur de la malléole latérale et pousse vers l’arrière pour induire le glissement postérieur. Pour obtenir un glissement antérieur, plutôt que de tirer vers l’avant, il est préférable de placer le patient en décubitus ventral, pied et cheville hors de la table. Le tibia étant fixé d’une main, le praticien pousse la malléole vers l’avant avec un appui de l’éminence thénar. La présence d’éléments vasculonerveux dans cette zone impose la délicatesse et la prudence.
Talocrurale
Le déficit de mobilité de la talocrurale en flexion dorsale aura une répercussion sur la marche et une augmentation de travail des muscles de hanche et érecteurs du rachis. En reprenant l’exemple de l’entorse latérale de cheville, on peut envisager que le talus soit resté en dysfonction dans une position antérolatérale. Ainsi, le glissement postérieur, l’inclinaison médiale et, par conséquent, la flexion dorsale de cheville, sont déficitaires. L’objectif est donc la « réintégration » du talus dans la pince tibiofibulaire, c’est-à-dire le gain en glissement postérieur, inclinaison médiale et flexion dorsale. Le patient est placé en décubitus dorsal. Le praticien est aux pieds de ce dernier. Il prend l’arrière-pied avec une prise bimanuelle bilatérale. Le pouce de la main latérale vient se poser sur le col du talus. L’autre pouce est à la face plantaire, les doigts de cette main viennent sur la face dorsale et plaquent l’appui sur le col du talus. La jambe est légèrement surélevée de la table. Une traction est alors imprimée dans l’axe de la jambe pour décomprimer l’articulation. Ensuite, et en gardant cette décoaptation, le praticien effectue un geste vers le bas et le dedans. La cheville est ainsi amenée en flexion dorsale et légère éversion, ce qui produit le glissement postérieur du talus.
Pour améliorer un glissement antérieur dans un déficit éventuel de flexion plantaire, le sujet est placé en décubitus dorsal, genou et hanche fléchis. Le pied repose sur la table et est fixé par une main l’encerclant. Un appui au tiers inférieur du bord antérieur du tibia vient pousser ce dernier en arrière. Par réciprocité, un glissement antérieur est alors créé.
Subtalaire
Il est rappelé que cette articulation « tangue dans le plan frontal, vire dans le plan horizontal et roule dans le plan sagittal ».
- Talus antéromédial : patient en décubitus dorsal, les pieds au bord de la table. Le praticien est au pied du sujet, en dedans de la cheville à traiter. Il positionne l’éminence thénar de la main gauche sur la face latérale du calcanéus en l’empaumant et le bord ulnaire du Ve métacarpien de la main droite sur le versant médial de la tête talaire. Il mobilise en pivotant vers la droite et en dirigeant l’avant-bras droit en arrière et en dehors.
- Talus postérolatéral : patient en décubitus dorsal, les pieds au bord de la table. Le praticien est au pied du sujet, en dehors de la cheville à traiter. Il positionne l’éminence thénar de la main droite sur la face médiale du calcanéum en l’empaumant et le bord ulnaire du cinquième métacarpien de la main gauche sur le versant latéral de la tête talaire. Il mobilise en pivotant vers la gauche et en dirigeant l’avant-bras gauche en bas, en avant et en dedans.
Médiopied
Il est constitué du naviculaire et du cuboïde. Ces derniers sont soumis à des contraintes rotatoires et de compression importantes, notamment lors de la phase d’impulsion de la marche où les têtes des métatarsiens sont posées au sol et où l’arrière-pied doit être mobile. Il paraît important de souligner que dans les vrais pieds plats, où le bord médial est effondré même quand le sujet se met sur la pointe des pieds, des problèmes d’hypermobilité ou de laxité peuvent se poser. La pérennité des résultats d’une mobilisation spécifique n’est donc pas envisageable. Ces os ont des surfaces articulaires planes, mais du fait de leurs moyens d’union spécifiques leur principal mouvement est rotatoire. Ainsi, par consensus, la rotation latérale correspond à une ascension de leur partie médiale et à un abaissement de leur partie latérale. Si nous reprenons l’exemple de l’entorse latérale de cheville, il est possible d’observer un déficit de rotation médiale du naviculaire car il se trouve alors en rotation latérale à la fois par son glissement et l’action du tibial postérieur.
La mobilisation réalisée est ici une mobilisation du médiopied par rapport à l’arrière-pied. Aussi, dans les gestes de traction effectués des articulations sont forcément intercalées. Leur intégrité doit être vérifiée avant tout traitement.
Naviculaire
Dans le cas d’une restriction de mobilité du naviculaire en rotation latérale, l’indication de la thérapie manuelle est conditionnée par la position du naviculaire par rapport au cuboïde. Le patient est installé en décubitus dorsal. Le thérapeute est situé latérale- ment et au pied, la main prend contact par l’éminence hypothénar avec la face supérieure du naviculaire et, plus précisément, avec sa partie médiale. L’autre main se pose à la face plantaire du pied et les doigts peuvent se croiser au bord médial. L’avant-bras de la main supérieure est situé dans l’axe de la jambe. La main plan- taire aide à positionner la cheville en position neutre et l’appui dorsal pousse vers le bas pour abaisser le bord médial de l’os, qui glisse alors inférieurement, imprimant ainsi une rotation médiale. Dans le cas où la rotation latérale serait déficitaire, nous sommes le plus souvent dans le cas d’un abaissement de l’arche interne et la technique décrite n’est pas efficace. Le renforcement musculaire du tibial postérieur peut être nécessaire et le taping une alternative. Classiquement l’appui se fait aussi au bord médial, mais à la face plantaire de l’os. Une main dorsale maintient le pied et l’autre pousse dans l’axe de la jambe, vers le haut.
Cuboïde
De la même fac¸on que le naviculaire, le cuboïde peut avoir un déficit de rotation médiale (séquelle d’entorse externe) ou latérale. Pour un déficit de rotation patient en décubitus dorsal, le praticien prend le pied de fac¸on bilatérale. Le pouce de la main est à la face dorsale. Les doigts de l’autre main viennent se poser sur lui pour optimiser l’appui. L’éminence thénar prend appui sur le bord latéral du cuboïde. La cheville est en position neutre. Par une traction dans l’axe de la jambe et vers le bas, un glissement de la partie latérale de l’os est imprimé avec une rotation latérale de celui-ci.
Pour effectuer une rotation médiale, le patient doit être en décubitus ventral, genou à 90◦ de flexion. Une main maintient la jambe avec une prise au tiers inférieur de celle-ci et l’éminence hypothénar de l’autre main vient effectuer une poussée dans l’axe jambier sur la face plantaire du bord latéral du cuboïde.
Cunéiformes
Le cunéiforme médial a la même physiologie que le naviculaire et peut être traité de la même façon. Les deux autres cunéiformes voient leurs mouvements limités aux glissements inférieur et supérieur. En fixant le naviculaire et le cuboïde avec une main qui encercle le pied par son bord médial, une prise bidigitale dorsoplantaire, entre le pouce et l’index, peut venir imprimer le glissement inférieur en poussant vers le bas et le glissement supérieur en poussant vers le haut.
Métatarsiens
De la même fac¸on, et considérant ces articulations planes, une prise fixe les cunéiformes et le cuboïde en encerclant le pied par son bord médial, alors qu’une prise bidigitale dorsoplantaire peut imprimer les glissements voulus. Il est à noter que pour le cinquième et le premier métatarsien, il est possible d’utiliser des prises plus larges en posant l’éminence hypothénare à leur base.
Métatarsophalangiennes et interphalangiennes
Les surfaces articulaires des segments caudaux sont concaves et répondent à la règle homologue. Ainsi, pour un gain en flexion, le glissement inférieur est travaillé. Des prises bidigitales sont utilisées. Il est intéressant de noter que le travail du glissement latéral est indiqué dans les pathologies d’hallux valgus.
Conclusion
Les techniques de thérapie manuelle appliquée au pied doivent permettre au podologue d’appréhender l’approche thérapeutique. Bien que ne faisant pas partie directement de son décret de compétence, il est logique d’envisager qu’une connaissance des bilans et des techniques peut l’aider dans sa pratique quotidienne. Nous retrouvons ici notre approche qui se base sur la « libération tissulaire ». Il peut s’avérer judicieux, notamment face à des atteintes chroniques, d’associer des techniques actives de renforcement et de stabilisation musculaire (« maintenir ») ainsi que des conseils thérapeutiques (visite régulière chez le podologue, renouvelle- ment des semelles, exercices simples à faire seul). Il s’agit donc « d’entretenir ».
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Le bilan podologique est l’acte majeur dans l’exercice quotidien du podologue. Il détermine le choix thérapeutique.
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